Épisode 6 « Administration, dématérialisation,précarisation … » enregistré le lundi 9 octobre 2023, en compagnie de Laure, travailleuse sociale à Point d’Eau, Pierrot, Marc, et Siriki.
De quoi s’agit-il exactement ?
« Il est inacceptable que certains noms et certaines adresses condamnent au chômage », a jugé la Première ministre le vendredi 27 octobre 2023 …
Alors que dire, Madame la Première ministre, que certains accidentés de la vie soient déjà condamnés à la précarité, l’exclusion, la stigmatisation, et la discrimination de fait, dans l’accès équitable aux droits sociaux dans les villes de France aujourd’hui ?
Politique assumée d’abandon des derniers de cordées ? Où négligences réductionnistes des effectifs de la fonction publique, censées à la base, prendre soin des plus fragilisés de nos sociétés ?
L’embauche c’est rien Madame la Première ministre …, à côté des fossés des non-logés, des affamés, des non soignés, des laissés pour compte de la société, qui meurent à l’entrée des gares de TGV.
Une jeune femme est décédée ce mois-ci, faute de soins, et de prises en charges adéquates, alors que dire de ce monde ou le statut « d’oubliés », nous fait passer de l’autre côté, vers une sous-citoyenneté acceptée par la lâcheté de la cécité.
« Monsieur le Président de la République, est-ce cela votre vision de la start-up nation ? »
Un pays où la ressource humaine, devenue consommable, devient jetable, parce que non rentable, plus assez vendable ?
C’est en continuant mois après mois, de recueillir bénévolement des témoignages concrets de personnes courageuses, qui n’ont plus rien face à l’adversité, en détresse de tout, que nous allons une fois de plus chercher à comprendre, déboires, ressorts, méandres, et chicanes de nos administrations, toujours impeccablement propres sur elles, dont le rythme imposé et effréné des réorganisations, toujours plus complexes pour les usagers, finissent systématiquement, comme par hasard, par des réductions de prestations, non pas pour vivre, mais simplement pour tenter de survivre, AVEC TOUJOURS MOINS; dans un monde où les malades et les inadaptés de la cécité, ne sont pas toujours du même côté de la rue à traverser, dans le silence assourdissant du grand hold-up générationnel, des mutualités bradées, la casse sociale organisée, de la citoyenneté bafouée, par ceux censés en être les garants, nos semblants de représentants.
L’exclusion est d’abord un monde de préjugés, qu’il est nécessaire de faire tomber, en écoutant le vent des mécontentements, aux lieux des médisants, des méprisants, des dénigrants, luxe des condescendants.
La « réthorique du fric ou du flic », de la carotte et du bâton, ne suffisent plus à éluder les éducations aux aspirations légitimes des libertés de conscience, systématiquement bafouées, génération après génération.
L’aspiration à vivre est légitime, pas le travail forcé. L’activité est noblesse de la liberté, luxe de castes, ferment de toutes les inégalités.
Alors de quoi on va causer ?
Ben de poésie, de la détresse slamée, en dédicace à la débrouille, en hommage aux abandonnés de nos sociétés, avec 20 mots,
imposés, par la précarité de leur sous-citoyenneté, endossée par l’absence de traitements de leurs dossiers, classés verticalement à leurs enterrements.
Un mort de faim et de soins dans la rue est un dossier de moins, voilà la cynique comptabilité de nos sociétés aujourd’hui.
Les 20 mots imposés à notre slameuse anonyme du jour, pour une rédaction en 40’ sont:
- rêve
- mal
- trêve
- grève
- âme
- temps
- crève
- ailes
- paix
- exister
- négligence
- réparer
- vérité
- monde
- vendre
- contrôler
- enfer
- horaire
- déni
- accès
Alors, « Administration, dématérialisation,
précarisation », qu’est-ce que c’est ?
Des politiques de désertification de la fonction publique ?
Des politiques d’étranglements administratifs ?
De la répression administrative à bas bruit ?
Du broyage de dossiers dans l’organisation ingénieuse et savante de chicanes administratives perpétuelles ?
Voilà de quoi témoigne l’émission recueillie dans la rue aujourd’hui:
Que sont les différents statuts administratifs ?
Quelles démarches dois-je faire ?
L’accès aux droits ?
La domiciliation administrative ?
L’accès au logement social ?
L’enregistrement ?
Auprès de quel organisme ?
Par quel moyen ?
Sur quel support ou formulaire ?
Quel document remplir ?
Avec l’aide de qui ?
Le document est-il complet ?
Ai-je toutes les pièces administratives demandées à joindre ?
Suis-je dans les délais ?
Ai-je reçu un accusé de réception ?
À quelle adresse lorsque je n’en ai plus,
ou que l’adresse administrative officielle n’est abusivement plus reconnue par certains organismes en manque de personnel ?
La dématérialisation des services publics sert-elle de paravent à une diminution des effectifs à bas bruit de la fonction publique ?
Une telle dématérialisation ne crée-t-elle pas une minoration de droits de fait pour certains ? catégorisés de fait en “sous-citoyens” ? Par simple impossibilité technique de faire valoir ses droits humains fondamentaux (une adresse, un toit, un repas, une santé) ?
Que reste-t-il comme solutions pour s’en sortir (à part le suicide) à des êtres humains déconsidérés, qui n’ont plus rien, à bout de forces, de temps, de courage, et d’espoirs ?
L’autonomie ?
La précarité engendre progressivement une dégradation systémique de la santé, bien connue par l’administration, mais l’on somme paradoxalement, aux plus fragiles et plus précaires de la société, de “l’autonomie” dans les labyrinthes circulaires organisés des procédures administratives de plus en plus complexes, pour quelles fins sont assumées les contraintes digitales organisées, la faim des usagers ou la fin des usagers ?
Même avec bac+7 c’est compliqué de comprendre et d’agir dans les méandres des destructions des administrations à marches forcées.
La temporalité de la précarité qu’est-ce que c’est ?
Urgence réelle et procédures administratives, de quoi s’agit-il concrètement lorsque tu n’as plus rien, ni à manger, ni à te loger, ni à te soigner ?
C’est ce que nous allons explorer aujourd’hui.
Une émission réalisée bénévolement par Marc Lambelin.